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La Grande Guerre par les artistes, no 3, [1er décembre] 1914, première de couverture
Crédit photographique : © Fondation Félix Vallotton / SIK-ISEA (photographie : Philipp Hitz)
Droits : Réservés
La Grande Guerre par les artistes
La Grande Guerre par les artistes
Le 2 août 1914, la proclamation de l’ordre de mobilisation générale bouleverse Vallotton. À dater de là, son quotidien est centré sur les événements. La guerre, devenue source d’inspiration, stimule ses réflexions et diversifie ses modes d’expression, éveillant une force créatrice nouvelle. Après plus de dix années consacrées exclusivement à la peinture, il se remet au dessin de presse d’une part pour le périodique La Grande Guerre par les artistes, à la xylographie d’autre part pour graver les six planches de l’album « C’est la Guerre ! », qui dénoncent les horreurs de la guerre.
Le 21 octobre 1914, il note dans son Journal : « Je vais pour me raccrocher au travail essayer de faire un dessin pour une publication, les idées ne sortent pas, la main est lourde, c’est tout un métier à reconquérir » (Documents, vol. III, p. 39). Il évoque sans doute de sa première contribution à l’album La Grande Guerre par les artistes.
Cette publication patriotique paraît deux fois par mois à partir de novembre 1914. Elle comptera vingt livraisons, numérotées mais non datées, qui seront ensuite réunies en un volume : La Grande guerre par les artistes. 1914-1915, préface de Gustave Geffroy, Nancy, Berger-Levrault, Paris, Georges Crès, [1915]. Chaque fascicule comporte huit ou neuf planches imprimées uniquement au recto. Les précède, signée par les éditeurs et datée de novembre 1914, la déclaration d’intention suivante : « [...] permettre [...] de dresser à nos héros un monument durable de leur vaillance. Il attestera leur héroïsme journalier, en même temps qu’il cloue au pilori le crime allemand. » On y lit encore : « L’élite des artistes français nous a fait le grand honneur de nous apporter son concours », notamment : Henri Gabriel Ibels, Charles-Lucien Léandre, Léon-Adolphe Willette ou encore Théophile Alexandre Steinlen. Neuf livraisons incomberont chacune à un unique dessinateur : Auguste Roubille (no 2), Hermann-Paul (no 4), Victor Prouvé (no 5), Frans Masereel (no 8), Charles Huard (no 10), Simpson (no 12), Louis Raemaekers (no 18), Charles Fouqueray (no 19). Vallotton, pour sa part, commence par livrer trois dessins à caractère humoristique pour les numéros 3 (voir ici), 9 (voir ici) et 15 (voir ici). Puis, il exécute toute l’illustration du seizième numéro, à savoir huit portraits de chefs militaires et d’hommes politiques, français, alliés et ennemis, dont trois d’après des photographies parues dans L’Image de la Guerre. Publication hebdomadaire illustrée. Le 22 février 1919, il écrit à Marius-Ary Leblond, qui prépare Galieni parle…, à paraître chez Albin Michel en 1920 : « J’ai effectivement de la guerre publié chez Crès une série de portraits d’actualité, mais n’ai pas fait de Gallieni, ni à ce moment-là, ni à aucun autre d’ailleurs. » (Paris, Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, Collections Jacques Doucet). Des « portraits d’actualité » qui sont stylistiquement en phase avec les objectifs de La Grande Guerre par les artistes tels qu’énoncés par les éditeurs dans leur déclaration d’intention : « Les acheteurs trouveront dans cette publication des dessins allégoriques ou satiriques, des scènes de mœurs, des tableaux de combats, des portraits stylisés par nos meilleurs artistes. »
Le 15 janvier 1915, Vallotton, Steinlen et Hermann-Paul se retrouvent pour discuter de La Grande Guerre par les artistes. Une soirée décevante, symptomatique de la distance qui sépare désormais les anciens camarades, à en juger par le compte rendu qu’en fait Vallotton dans son Journal : « Hier dîné au restaurant avec Hermann-Paul et Steinlen pour affaire de dessins. Dîner sans éclat, Steinlen vieilli, son pacifisme humanitaire se révolte à l’idée des atrocités allemandes, mais sans grande colère. Il me confirme l’opinion que j’ai que rares sont en France les gens qui savent haïr. Il dit des phrases blanches ; n’aurait jamais cru ça... et traite les boches de canailles, c’est tout. Hermann-Paul colporte les niaiseries de bureaux de rédaction... [...]. Ce garçon est d’un enfantillage désarmant. » (Documents, vol. III, p. 52).
L’édition courante de La Grande Guerre par les artistes a été tirée sur papier vergé à un nombre d’exemplaires inconnu. L’édition de luxe compte 100 exemplaires sur japon.
Non cité
Non cité
Deborah L. Goodman, « Vallotton et la Grande Guerre », in : Félix Vallotton, 1992, pp. 195-197
Vu du front. Représenter la Grande Guerre, cat. exp., Paris, Somogy, 2014, p. 179